jeudi 30 juillet 2009

Paul et les belles

Petit bouquet de nuits jeté à la gueule des demoiselles. En riant sous le voile de la mariée tu m’avais tout de suite frappé dans l’œil - sans faire exprès - On s’était retrouvé un peu plus tard, un peu plus éméchés, pas beaucoup plus bavards. Des gros gars jouant des coudes à coudes m’entrainaient dans une danse de table en banc de galère, vers Saint Pierre ou Miquelon. J’avais beau être secoué comme un filet de merlans, mes yeux frits je te les donnais tout entiers. Les tiens roulaient, tout cerclés de jaune, autour de moi. Il fallait absolument que je morde tes lèvres qui ne devaient pas s’échapper d’ici. Quel fureur de voir ton front un peu perlant, je t’aurais mangé d’une traite avec ton fatras et tes seinterdits.

mercredi 29 juillet 2009

Sans filet

Paressant au long des lunes
Des cheveux noirs, mon cœur en bulle
Ma vie sans filet, sans filet
On ne voyait sous tes dessous
Que cri de rue et mer sans loup
Ma vie sans filet, sans filet

Ici le temps tenait le coup
Tenait le cap, tendait le cou
Mais je filais, déjà je filais
Là-bas de rien, d’un coup de reins
Les dents de toi m’ont paru loin
Comme si je vivais sans filet

Et de fil et de bruit
J’accroche à la nuit
Mes boucles et mes demains
A tant croire que rien ne tient

Sur ma ville à mille huis
J’accroche à la nuit
Des bouts de mes comètes
Et l’heure brune où rien n’arrête
Mes nuits

Au son de corps en rouge allure
J’ai fermé l’aube, fumé l’azur
Qui défilait, défilait

Des si, des la, pour m’en sortir
Mais l’or de rien m’a fait te dire
Que je fuirai, que je fuirai
Chanter c’est boire au même vin
Titube et tombe, rien ne se retient
Sans filet, sans filet

lundi 27 juillet 2009

Les comètes



Les mots tombent en trombe dans les rues de Brest, de la Bretagne et du monde. Un nuage immense tient le ciel dans ses bras étouffants. Il fronce les sourcils sur l’Armor détrempée. Autour des planètes s’agitent les grappes d’hommes qui tous rêvent de fuir par la mer ou sur le bec des sternes. Finistériens buveurs de houle. De la bière et du rhum bon marché pour que les rues tanguent, pour que les néons deviennent lucioles et qu’au fond des caniveaux on nomme ça d’héroïques noyades. Je pose doucement la tête, mon cœur hémophile se déverse le long de ton dos de granit. Ma roche a le nom de Dieu, du Calvaire à l’Océan. Odyssée
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vendredi 24 juillet 2009

Les étangs d'herbe


Au souffle court qui marche et court au bout du souffle. Les étranges étangs d’herbes du Mont nous piquaient les jambes à chaque fois que nous les enjambions. Sur l’argile trompeuse nous glissions, convaincus de la voir sèche. Un peu partout prenaient forme des chemins dans l’herbe mais l’on ne saurait dire d’où venaient ces traces. Nous sautions par-dessus des mares longues et rouillées. Nous sautions avec nos jambes, courtes ou fines, avec nos jambes qui marchent. Sur la ligne d’horizon deux formes s’agitaient comme sur un fil. Et nous n’aurons vu d’elles que leur dos ronds sans pouvoir distinguer le chien du loup.
Entre les deux, le Mont finit de souffler ses épuisants visiteurs hors de lui. Lui aussi est à bout de souffle et l’on dirait même que ses épaules s’affaissent quand le soleil regagne ses quartiers. Alors, les petites lumières s’accrochent à l’incassable granit, lui redonne les scintillements et les postures d’un combattant de Lucifer. Nous qui nous étions arrêtés quelques instants au milieu des polders allions bientôt rejoindre l’âtre d’un château d’Argol en éternelle reconstruction.
Et sur ces champs pleins de jaune et de grives, on ne sait vers quel endroit plus beau peut bien partir le soleil écarlate.
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Photo Pauline S.

jeudi 23 juillet 2009

Retour de nuit

Jean Vilar me regarde d’un air de grand guignol de 8 mètres de haut à la veille de la grande parade.
Aahvignon !...

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mardi 21 juillet 2009

14/01/2009 - Place Edith Piaf

Sous la bâche, du vin rouge, du vin chaud.
Il fallait bien boire puisque la pluie n’avait pas suffi à nous tremper les yeux.
J’avais l’impression de loger dans un lampion ou de gîter comme une fane à la tête brûlée.

Nous balancions
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Du vin chaud, des joues rouges.
Sous la bâche tu me disais que l’amour passe et qu’il n’existe pas
Mais je regardais glisser les gouttes le long de cette bâche
Une nuit en automne quand je soufflais les azurs pour les rouler sur mes doigts

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dimanche 19 juillet 2009

Saint-Paul ailleurs



Autour du cercle jaune de tes yeux coule une nuit interminable.
De l’endroit où naît le parfum on aperçoit les poussières de Tripoli, les chants laissés là-bas et qui t’attendent. Saison à revenir, à vendanger quand elle reviendra.
Soulagé d’avoir posé mes lettres sur tes yeux, d’avoir gravé mon nom sur ton poignet nu.

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Photo William Chancerelle

jeudi 16 juillet 2009

Je cours

Ce matin l’avion vrille et détourne ses ailes dans un ciel plein d’oiseaux kamikazes, au-dessus des Andes vertes et blanches tu ne peux voir depuis ton hublot que je cours sur mes ânes à travers toutes les forêts, tous les marécages, toutes les décharges, tous les temples Incas, Gracques, Héliodores.

Sancho pensa qu’il te garderait mais je souffle plus fort que n’importe qui quand il s’agit de toi

Les accordéons, les souffleries de l’Opéra, les huées des supporters me font un peu rire quand je vois où mène ce monde. Entends déjà mes lances sanglantes, mes dents acérées, mes poings lourds qui ne savent caresser que tes joues.

mercredi 15 juillet 2009

Orsay

L’entrechat à la gare d’Orsay
La Seine s’attendrit
Te voir
Pékin en train, je n’attends rien comme toi
A la gare d’Orsay devenu musée
A la seine devenue putain de Paris
Je n’attends rien comme toi
A la gare écroulée,
Petit lit de fleuve sale et noyé
Je n’attends rien comme toi

mardi 14 juillet 2009

Comme neuf



Notre maison, lieu d’automne, est une citrouille pleine comme un crâne. Nous y trouvons la nourriture des refuges, un pain salé, des traces de farine sur les nez de cuisine. L’attente de créer nous harcèle du salon à la cave quand il pleut. Parfois. N’oublie pas le pianiste sur son bateau, nous n’avons pas d’identité les uns pour les autres, tant mieux, ici personne n’exige rien de l’autre. Ta tête ronde, ta barbe noire, tes yeux du matin et les tiens, ceux du soir. Appétit de cuisine embrumée. Mon tabac joue la diva en escale.
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Photo William Chancerelle
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lundi 13 juillet 2009

Au bar



Au Procope, une photo de toi en apocope
on a rarement fini les phrases
même l’été avait laissé des points en suspension
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Photo William Chancerelle
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vendredi 10 juillet 2009

Retour de flamme




C’était bon de te savoir toujours prompte à me souffler au cœur
J’aimais ça vivre dans des méandres où tu reviendrais
Peut-être même que j’aimais que tu doutes
Un amour qui souffre, belle comme l’Atride pénitente
Photo William Chancerelle

jeudi 9 juillet 2009

Jour de sable

Ménodée, méharée, vents d’Erythrée, d’Aziyadé, de glaçon de thé
Vent de désert, d’ispahé, au souffle dilaté par des femmes mortes, des amours jamais arrivées
L’attente et le doute sur un coin de terre jamais là au bon moment
Pas à pas rendu désert
D’amours jamais arrivées
Jamais arrivées

mercredi 8 juillet 2009

Le marché aux rapines

Le marché aux rapines accueille les vents perdus. Ils s’engouffrent entre les tréteaux de bois et les tables recouvertes de toiles cirées vertes.
On y descend le matin pour sentir la glace parcourir les allées à bras de pieuvres.
Les détrousseurs saluent par des mouvements de cou discrets les brigands et les orphelins. Chacun d’eux tient près de son corps une gibecière de lapin noir contenant, selon l’arrivage, un nez d’aquilon, de bora, de williwan ou de mistral jauni. Ils s’en emparent ici et là prenant garde que personne ne les surprenne, même si tout le monde sait bien que leurs doigts n’ont pas gelé pour rien, que leurs yeux ne se sont pas asséchés sans raison.
Qui a gouté une fois le frisson du vent capturé devient voleur par destinée.

mardi 7 juillet 2009

Juin en silence




















Le cadre rouge de la fenêtre
sépare les yeux et laisse à chacun d’eux le bonheur de voir en plein
le ciel qui se couche
le soleil qui ploie
et la terre énorme de nuages
dont une plaie béante éblouit nos vies uniques et sans retour
L’incessant, le rocher gris
Notre maison nous abrite encore
Car voilà bien le dernier lieu où se perdre loin des autres
est un silence inépongé

Photo Manu Poisson-Quinton


dimanche 5 juillet 2009

On commence?


Pierre qui roule

photo William Chancerelle